mercredi 3 août 2011

Socrate chez le dr Freud

Hier j'ai lu ce qu'on raconte du procès de Socrate et de son emprisonnement après la sentence de mort.  Il se passe un mois entre la sentence et l'application du châtiment.  Platon raconte comment les amis de Socrate tentent de le convaincre de s'échapper de la prison et de partir en exil: c'était une pratique courante, si on payait les pots de vin. Socrate s'applique à convaincre ses amis qu'il est raisonnable de ne pas partir et de se laisser tuer.

Je n'aime pas qu'on soit dupes des beaux sermons de Socrate. Ses raisonnements pleins de moralité cachent autre chose: le vrai mobile de son suicide.  Pourquoi choisit-il de mourir, tout en faisant porter l'odieux de sa mort aux personnes qui ont voté sa condamnation?

Pour comprendre un peu, il faut quitter le beau dialogue tricoté par Platon, et suivre une piste que nous donne Socrate. Il a parlé de son démon intérieur: un bon génie qui lui dit toujours ce qu'il ne faut pas entreprendre. Je ne suis pas certain qu'on doive installer une auréole sur la tête de cet ange-gardien de Socrate. On gagnerait à le démasquer.

Durant ce mois qui précède sa mort, ses amis le visitent en prison car ils ont de l'attachement pour lui. Socrate continue à jouer au professeur irréductible, expliquant par questions et réponses comment il est raisonnable d'obéir à des lois déraisonnables. Il me semble enfermé dans son personnage de raisonneur à tout crin. Sa grande force, il l'utilise contre lui-même, elle devient sa faiblesse. Il me fait penser à un pape qui ne peut plus sortir de la bouteille dogmatique dans laquelle il est allé s'enfermer, condamné à une vérité impossible.

Socrate gagnerait à se payer une visite chez le dr Freud.  Ce serait un pas de plus, dans la bonne direction: celle du "connais-toi toi-même". Socrate pourrait reconnaître et accepter qu'il est ce besoin de mourir, sans avoir à se justifier à son ami Criton. Socrate nous toucherait parce qu'il deviendrait vrai. Et puis, il se reposerait un peu de cette mission de pédagogue qui le fait courir sans fin comme un écureuil dans une cage.

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