mercredi 11 mai 2011

les oeufs pourris

Le grand-père Alexandre vivait à
Joliette, dans une grosse maison
cossue. Sauf l'été:  il déménageait
à la campagne, qui était juste de
l'autre côté de la rivière.  Mes
beaux souvenirs d'enfance, ils
sont enfouis dans le grenier de
cette maison d'été.  On y grimpait
pour y dormir, ou bien pour y
jouer les jours de pluie.

Chaque soir, Alexandre nous
emmenait dans sa vieille chrysler
jusqu'au parc, de l'autre côté du
pont:  on allait y remplir deux
cruches à la fontaine.  C'était
une source d'eau sulfureuse,
froide, jaunâtre, malodorante,
et délicieuse.

Les gens de Joliette en étaient
friands:  il fallait attendre son
tour pour y boire un coup, et
ensuite emplir lentement nos
cruches de vitre brune.

Le cerveau humain est incomparable pour la qualité de ses souvenirs:  ce ne sont pas des mots, mais des sensations qui me reviennent, de cette eau froide, qui sentait les oeufs pourris, et qu'on adorait.

1 commentaire:

Jean Lapointe a dit…

J'aime bien ces lignes horizontales... Où as-tu pêché ça? On dirant de la bande dessinée, une sorte d'écriture automatique. Un peu Picassien. J'espère que tu croies aussi un peu en Dieu et pas seulement en Picasso, comme j'en connais... Tant qu'à croire, tu sais?

Les oeufs pourris?
Pourquoi pas les mangeurs de patates?