mardi 28 juin 2011

une picouille flottante. prise 3

Ce Merrimac était plombé par le destin:
à répétition il sombrait, et toujours on le
renflouait.  Je le cherchais dans la liste
des navires participant à la guerre contre
l'Espagne, en 1898.  Pas de mention du
Merrimac. Pourtant Georges Charrette
avait allumé la mèche, et on l'appelait
le héros du Merrimac.

Le récit de cette guerre, pour libérer Cuba
de l'emprise espagnole, est fascinant. On
apprend comment les journaux ont forcé
la main des politiciens qui ne voulaient
pas de cette aventure. J'en lisais les
péripéties quasi rocambolesques, tout en
cherchant à l'horizon mon Merrimac.

Horreur! aucune mention d'un chenail
obstrué par l'épave héroïque! La flotte
espagnole avait quitté le port de Santiago
le matin du 13 juillet. Ils étaient en
mauvais état pour combattre. Les navires
américains les avaient pris en chasse et les
avaient détruits en quelques heures.

J'avais la gorge sèche. Le journal La Presse avait-il raconté des sornettes, en célébrant Georges Charrette, le héros qui avait précipité la défaite espagnole?  En tout cas, jusqu'à la dernière ligne, Wikipédia gardait un silence poli sur le fond de l'affaire.

J'ai cessé de tourner autour du pot et suis allé à la recherche de Georges Charrette, vu l'absence du Merrimac dans le récit de cette guerre. Ouf!  Enfin!  Le héros sortait de l'ombre. Mettez votre ceinture de sécurité, on décolle.

C'est l'histoire d'une picouille agonisante, un cargo chargé de charbon, toujours en panne mécanique.  Il avait usurpé un nom glorieux, celui de Merrimac. Evidemment qu'on ne mentionne pas son nom parmi les gloires de la flotte de guerre. Une grosse barge de ravitaillement, tellement problématique qu'on a songé tout de suite à l'utiliser pour une opération kamikaze.  Un suicide, du moins pour la brochette de jeunes marins qui avaient à l'échouer dans cette embouchure du port de Santiago. L'opération eut lieu dans la nuit du 3 juin 1898.

Jusqu'à la fin, ce Merrimac a été pitoyable: il n'a même pas réussi à se positionner correctement pour mourir dignement. Il a été copieusement mitraillé par les batteries espagnoles. Au petit matin, cramponnés au canot de sauvetage qui flottait à l'envers, les huit héros ont été rescapés par une vedette espagnole, puis  emprisonnés. Un mois plus tard, après la destruction de leur flotte de guerre, les Espagnols capitulaient et libéraient les braves.

Ce serait bien de connaître la suite: les quarante années de vie qui ont suivi l'épisode du Merrimac. Toute cette famille des Magnan et des Charrette, à Lowell...  Dans mon imaginaire d'enfant, il y a toujours la princesse chinoise, et le tour du chapeau: Georges Charette faisant trois fois le tour du monde...

1 commentaire:

Michel à Isabelle a dit…

Ah la la, quelle histoire!
mais quand même, une fin bien tragique, même pour un rafiot pareil.
Et ce brave cousin qui risque sa vie pour l'honneur et la gloire de tout un chacun...à côté de ça, notre histoire est une épopée de fleurons glorieux?
Et la princesse chinoise maintenant?
Allez,on veut tout savoir!